YOURI BRÛLE LE MIC’ ET DES BAGNOLES DE FLICS

“Russe comme Poutine, Grec comme Léonidas” voilà le gimmick efficace (même si on aurait préféré un “Russe comme Lénine”, vous comprendrez pourquoi) qu’a trouvé Youri, rappeur de Paris Sud pour se présenter. Se placer sous le patronage de ces deux illustres personnages, c’est finalement assez bien résumer sa volonté dans ce game : tout croquer, et violemment si possible.

 

Le jeune MC fait preuve d’une productivité assez impressionnante, puisqu’en 2 mois, mai et juin derniers, il a sorti coup sur coup 2 mixtapes efficaces, Tsar Trap vol.1 et #FREETSAR vol. 1, dont la majorité des sons a été clippée, ce qui souligne la détermination du bonhomme et de son équipe.

 

Des instrus sombres pour la plupart, portées par un débit rapide, et un placement sans faute, qui le met dans la lignée des rappeurs techniques de l’époque, voilà ce qui saute à l’oreille dès la première écoute. Le rappeur multiplie les allitérations, et s’il verse quelquefois un peu dans la facilité des rimes (l’écueil inhérent à ceux qui veulent absolument faire passer le flow avant le fond), on peut aussi considérer que le jeune Youri a encore une marge de potentiel énorme dans l’écriture et que ces deux EP, qui passent crème à l’oreille, composent une sorte de tour de chauffe.

 

A l’instar de son comparse Takos (dont nous avions parlé il y a quelques mois), le rappeur franco-helleno-ruskoff mélange habilement l’hédonisme de la jeunesse et l’engagement politique. On sent que les deux boug’ sont dans les mêmes sensibilités, voire traînent dans les mêmes cercles affinitaires (S/o AFA). Ca parle tout autant de soirées où on se la colle sévère que de casses de banques et d’affrontement avec les keufs.

 

Ces deux rappeurs suivent le mouvement d’une partie de la jeunesse française qui revendique de plus en plus ouvertement le recours à des actions non-conventionnelles pour faire écouter son mécontentement., On pourrait considérer que, consciemment ou non, les morceaux à proprement parler “politiques” des deux EP (notamment “Époque de merde” et le joyeux “Jour de manif”), et les phases disséminés toutes au long des morceaux (notamment le savoureux “J’me branle devant du riot porn”) font la synthèse de l’idéologie du moment. On retrouve du Comité Invisible en filigrane des morceaux : pas de programme, pas de projections dans l’avenir, juste la certitude que le “système” est pourri et que la stabilité se trouvera dans l’incandescence de l’émeute. Le gimmick de « Jour de manif » pourrait d’ailleurs ressembler à une comptine enjouée :

 

Lapider les keufs, péter les banques

Brûler les cravates et buter les patrons

J’m lève chaque matin comme un jour de manif

J’aimerai qu’chaque matin soit un jour de manif

 

Récemment la réflexion était menée, au sein des milieux militants, sur la manière dont il était possible d’ouvrir les cercles autonomes à un milieu plus large, notamment via des vecteurs populaires. Si leMFC 1871 permet de faire connaître l’AFA via le football, on peut espérer que des rappeurs comme Youri ou Takos permettront de rajeunir l’idée de la lutte en la rendant plus attrayante.

 

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